« Affronter le quotidien par un futur imaginaire », est un travail socio-documentaire, débuté en mars 2020, qui traite des histoires personnelles des jeunes décrocheurs scolaires de la ville de Calais se trouvant en réinsertion professionnelle via l’organisme social le SAS Coluche. Touchée par le vécu de ces jeunes et leurs volontés de réinventer leurs vies, je poursuis ce travail à moyen et long terme afin de montrer l’évolution et la transformation dans les parcours de ces jeunes compte tenu d’un contexte socio-politique difficile.
La ville de Calais fait partie de la région des Hauts-de-France, touchée par une grande pauvreté, un taux de chômage élevé et également considérée par l’INSEE comme la plus jeune région de France. Avec 1,1 million de jeunes, elle bat tous les records en France et multiplie les difficultés de scolarisation. En 2015, un jeune sur huit de la région (soit 12 % des 16-24 ans) n’est plus scolarisé et sorti du système sans diplômes. Les jeunes Calaisiens se retrouvent donc avec plus de défis à affronter pour se construire que ceux des autres régions.
Grandis dans les quartiers populaires : Beau-marais, Fort Nieulay, Les Cailloux ou encore Saint-Pierre, beaucoup décrochent aux collèges, lycées pour des raisons variées : harcèlement, homophobie, désocialisation, problèmes familiaux ou de logement, manque d'autonomie ou encore délinquance. Malgré les difficultés auxquelles ils font face, ces décrocheurs scolaires rêvent de réparer leur passé, d’oublier leurs blessures, de retrouver l'amour et le bonheur.
Par cette série photographique, j’explore les univers et les inspirations, les identités de ces jeunes, stigmatisés « en échec », en me posant les questions suivantes : « Qui sont-ils ces décrocheurs scolaires ? Que vivent-ils au quotidien ? Quels métiers voudraient-ils faire ? Quel loisir ? Quels sont leurs talents qu’ils n’ont pas eu l’occasion de révéler ? De quoi ils rêvent ? ».
Par le biais de la photographie, j’ai voulu servir à ces jeunes de miroir pour représenter leur « je-moi » en leur demandant quelle serait leur vision d’eux-mêmes, à la fois réelle et fictive ? Pour cela, je mets en scène leurs rêves, je les mets eux-mêmes en scène invisible qui se relève sur papier, mais pas que.
Les psychologues nous disent que pour atteindre son rêve, il faut d’abord le visualiser, le palper dans ses pensées. Ils conseillent de se mettre dans la peau de celui qu’on veut devenir au moins pour une seconde afin de lancer le mécanisme de réalisation. C’est ce qu’ils appellent se donner les moyens. Il devient alors possible pour ces jeunes de faire ce premier pas à travers le geste photographique et de faire de leur imaginaire une aventure possible du réel, un espoir d’une vie meilleure.

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